L’été est bien fini. La transhumance d’automne renvoie hommes et bêtes dans les villages d’en bas. Suivons cette journée particulière partagée en famille, à Manigod, en Haute-Savoie.

Agitation extrême dans la ferme d’alpage de la Croix Fry. Des pas dévalent l’escalier, des cloches font un tintamarre incroyable, des cris d’enfants surexcités fusent au milieu de toute cette frénésie… L’heure est au démontagnage, comme on dit ici, en Haute-Savoie. Nicolas Veyrat, jeune exploitant fermier, s’active avec son frère, Franck, pour que le retour au bercail se déroule au mieux. Les vaches ont déjà passé près de cinq mois à paître au grand air des montagnes, il est temps de revenir au village, dans la ferme du bas, en prévision de l’hiver. Meubles, valises, matériel, hommes et animaux… tout doit redescendre. Le grand déménagement s’annonce. La famille Veyrat-Durebeix est réunie au grand complet pour l’événement.

Une tradition familiale

Installés depuis des générations à Manigod, au cœur du massif des Aravis, les Veyrat sont fermiers de père en fils. Retraités mais toujours à pied d’œuvre matin et soir pour fabriquer le reblochon, Simon et Madeleine ont vécu leur première transhumance en 1956. Les fils, Franck et Nicolas, ont pris la relève, et le petit-fils de 13 ans, Jordan, a une passion grandissante pour les vaches.

Aujourd’hui, ces dernières vont parcourir sept kilomètres avant de retrouver leur écurie (on ne dit pas étable en Haute-Savoie) où elles passeront l’hiver au chaud après quelques semaines dans les pâturages. Hier, Nicolas et David, le cousin ouvrier agricole, se sont attelés pendant la traite à tondre les pis et queues des bêtes. « C’est une fête, le retour au village ! Alors, comme on se fait beau pour aller à un mariage, les vaches aussi ont le droit de défiler toutes belles dans les rues ! », sourit Nicolas. Ses bêtes, il les aime, et pour finir de les parer, chacune porte autour du cou une énorme cloche bien sonore.

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Une histoire d’amitié

La transhumance, c’est aussi une histoire de famille et d’amis. Mireille, la fille de la famille, vient de rejoindre l’alpage et voilà des habitués de ces moments forts qui franchissent à leur tour le pas de la ferme. Place au déjeuner, préparé par Stéphanie, la femme de Franck. Devant une bonne terrine de cochon faite maison, chacun y va d’un souvenir de transhumance… Le temps commence à presser. À peine le repas englouti, toute la troupe est prête à partir.

Un bâton dans la main, Nicolas et Jordan rassemblent les vaches. Les femmes et les enfants ont regroupé les chèvres plus haut sur la route. Bien encadrés, les bovins entament la « randonnée » de leur pas lent. Voitures, vélos et motos se frayent un passage en douceur à travers les troupeaux. Sourire aux lèvres, les oreilles rendues sourdes par le bruit des cloches, chacun avance d’un bon pas, tout en empêchant les vaches de prendre la clé des champs… Fifi, l’incroyable chien gardien, file comme l’éclair et répond aux sifflements de David pour mettre les mauvaises têtes au pas. Les enfants courent après les chèvres, promptes à prendre la poudre d’escampette. Sous le ciel bleu, les montagnes à perte de vue, les kilomètres s’égrènent. Les chèvres ont pris les devants par des chemins de traverse, et la bonne humeur est toujours de mise.

Un moment fort

À Manigod, le tintement incessant des cloches annonce le retour des abondances, taurines et montbéliardes de la famille Veyrat, et les habitants se pressent sur les bas-côtés pour les saluer. Du pas de leur porte, les voisins sont au spectacle. Les anciens du village, eux, perpétuent la tradition locale en offrant un verre en bord de route à tous ceux qui participent au démontagnage.

Il aura fallu trois bonnes heures de marche pour arriver à bon port. Les vaches rejoignent le pâturage et chacun retrouve sa maison, ses repères… Pause goûter pour tous, et c’est déjà l’heure de la traite. Si les plus vieilles vaches reconnaissent d’instinct leur place attitrée, les nouvelles venues, elles, ne se laissent pas si facilement maîtriser. À l’écart, Bella, une montbéliarde, montre les signes d’une mise à bas. Et c’est sous les yeux écarquillés des petits et des grands qu’elle donne naissance à un jeune veau, avec l’aide de Simon et Jordan. Le grand-père et son petit-fils auront permis à cette journée de se conclure sur ce moment d’émotion, partagé par tous à chaque vêlage.

  1. Tout paraît tranquille, mais la grande crainte, ce sont les dégâts que peut provoquer une belle dame taurine sur une voiture ou un parterre de fleurs !
  2. Les chèvres sont les plus rapides, c’est la course avec les enfants.
  3. La cohabitation se passe bien. Pour les vaches, les alpages sont déjà loin, que ceux qui veulent monter prennent leur temps.
  4. Le troupeau endimanché descend des montagnes, encadré par David, Franck, Pierre, Jordan et les autres.
  5. Une belle journée de plein air, joyeuse et bien remplie, toutes générations confondues.
  6. Les gens du village installent une table, une bouteille de vin et quelques verres sur le bord de la route pour bien accueillir les participants au démontagnage.
  7. Tout est bon pour transporter le matériel. Rien ne doit rester dans les alpages.
  8. La transhumance, c’est un grand déménagement… Tout doit redescendre !
  9. Fini la fabrication du reblochon dans les alpages et la liberté de contempler les cimes en paissant !

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