Queyras, un pays d’en-haut a su valoriser ses espaces naturels, son terroir et son artisanat avec harmonie. Il fait rimer charme avec vitalité.

Chez nous, on dit Queyra, on ne prononce pas le « s ». C’est à ce genre de petites formules sans appel, mais exprimées avec gentillesse que l’on cerne les habitants d’un pays, au sens où on l’entendait -autrefois. En l’occurrence, le Queyras est un territoire de passionnés qui y sont nés et entendent bien y -rester. Ils sont jeunes et moins jeunes, mais tout à fait irréductibles, comme certains Gaulois. Qu’est-ce qui retient tant les habitants et attire les touristes dans cette partie des Hautes-Alpes ? Des villages et des paysages très préservés. Pas de panneaux publicitaires, pas de constructions récentes pour loger à bas prix les hordes de skieurs pendant les vacances scolaires.

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Des montagnes de caractère

Les Queyrassins ont choisi la qualité plutôt que la quantité. On déambule ainsi dans des petits villages ornés de chalets tout en bois. Le Queyras, c’est une carte postale dans le bon sens du terme. D’Abriès à Ceillac, on n’est pas dans le plus grand espace skiable de France, mais la neige est présente de novembre à avril, bien souvent sous un ciel bleu et un soleil éblouissant. Des stations modestes, mais probablement l’un des plus beaux domaines permettant de skier en forêt, sur de vastes étendues. On retrouve le plaisir de la nature à l’état sauvage. Le ski alpin n’est cependant pas la seule attraction de ces jolies montagnes. Les cols Agnel et Izoard, à 2 744 et 2 361 mètres d’altitude, sont accessibles en skis nordiques ou en raquettes : le premier offre une admirable vue sur toute la vallée italienne et le mont Viso, le second est un magnifique belvédère sur le Briançonnais. Les torrents fougueux de l’été offrent d’étonnantes randonnées hivernales grâce à la pratique du ruisseling, qui consiste à remonter- les torrents gelés avec un guide, équipé de crampons et piolet. L’effort n’est pas vain : on franchit des endroits secrets, inaccessibles autrement, et on chemine au cœur de paysages féeriques. C’est une approche plus douce de la cascade de glace, une activité qu’ici, on peut même pratiquer de nuit. Les plus aventureux ont aussi le choix entre le parapente, le snowkite et la randonnée nordique, les plus romantiques opteront pour la promenade en traîneau tiré par des chiens.

Le travail du bois sculpté revisité

Pour apprécier le Queyras, dans tous les cas, il faut rechercher un certain art de vivre. Les traditions y sont restées bien vivantes avec notamment la fabrication et la restauration de cadrans solaires. En se promenant dans les huit villages stations du Queyras (Abriès, Aiguilles, Arvieux, Château-Ville-Vieille, Ceillac-, Molines, Saint-Véran, Ristolas), on peut admirer- ce magnifique patrimoine (voir Esprit d’Ici n° 11). La présence du pin cembro a permis, par ailleurs, le développement d’une ébénisterie spécifique à la région. Alors que les meubles savoyards sont peints, ceux élaborés dans le Queyras sont sculptés à la gouge. Rosaces et autres motifs caractéristiques, comme des fleurs ou des animaux, décorent les armoires, les lits, les tabourets…
Un travail à mi-chemin entre l’artisanat et l’art. Aujourd’hui, deux courants fleurissent pour le travail du bois : les anciens perpétuent une tradition avec des motifs et des -réalisations typiques du Queyras ; les jeunes, après être partis étudiés ailleurs, reviennent pour renouveler- l’approche du travail du bois sculpté (voir Esprit d’ici n° 16). À Ceillac, Claude Grossan se partage entre l’ébénisterie et -l’élevage de moutons qui n’a rien à envier à l’artisanat en matière d’authenticité. De même que l’homme sculpte dans les règles de l’art, il élève ses moutons à l’ancienne. A-t-on jamais vu pareille bergerie ? C’est un peu l’étable du petit jésus. Un rayon de soleil perce la pénombre dans laquelle de jolis agneaux tètent le lait de leur mère jusqu’à l’âge de 3 mois puis sont nourris au foin de montagne. L’été, les brebis de plusieurs villages se regroupent et partent avec un berger dans les alpages qui sont là-bas des terrains communaux.

L’art de vivre au naturel

En matière de gourmandise, le Queyras est la Mecque du « circuit court ». On trouve ainsi des produits de la région réunis à la Maison de l’artisanat. Une structure collective créée par un groupe d’artisans en 1989 afin de commercialiser la production locale, agricole et artisanale, sous forme de -coopérative. Miels, confitures, confiseries, charcuteries, fromages, liqueurs, -infusions… le plus haut Parc régional -naturel d’Europe fournit de nombreuses plantes et fleurs pour la fabrication de
ces produits du terroir. Elles servent également à l’élaboration d’élixirs de bien-être, comme les fleurs de Bach. Guy Giraudet a créé le Plantivore, une liquoristerie proposant toutes ces préparations. Ce puits de science connaît toutes les vertus des plantes ! Un passage obligé pour les adeptes de médecine douce. Que ce soit à table, dans le verre, sur les pistes ou dans les musées, le Queyras impose
sa nature, avec naturel.