À Aurillac, une maison de ville aux atours moyen âge conjugue le passé au présent avec authenticité

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C’est une de ces ruelles comme il y en a tant au cœur d’Aurillac. Sombre, étroite et bordée de façades plus ou moins décrépies. Jusque-là, rien d’extraordinaire. On cherche La Chapellénie, une maison d’hôtes. Spéciale, à ce qu’il paraît… On ne nous a pas menti : le seuil franchi, l’effet de surprise est immédiat. L’œil est saisi par les volumes, plus proches de ceux d’un castel de province que d’une maison de bourg. À ce décalage spatial s’ajoute un voyage temporel : nous voilà immergé dans une demeure médiévale qui, à notre grand soulagement, ne déroge pas au confort moderne.

Un lieu plein d’histoires

Longtemps à l’abandon, cette bâtisse était dans un triste état quand Isabelle et Friedrich Pfeffer l’ont adoptée. Le rez-de-chaussée servait de garage et l’étage était divisé en appartements, dans le plus pur style sixties : pièces cloisonnées, lino, papier peint… Pourtant son accès, un escalier à vis, était plutôt anachronique. Sa présence, ainsi que bien d’autres indices, laissait deviner que sous cette « croûte xxe siècle » se cachaient des trésors moyenâgeux. Un travail minutieux commença alors, avec bistouri et papier de verre, pour faire remonter le passé à la surface, strate après strate. Autant de témoignages de vies : cette famille-là aimait le bleu, celle-ci raffolait visiblement du vert… Le décapage des patines, précis et doux, fut réalisé par une historienne d’art, Francine Van Hertsen, qui a restauré de nombreux palais et églises en Italie.

Deux ans de travaux ont été nécessaires pour mettre en valeur tous les éléments historiques : la tour et son escalier à vis, les poutraisons, les arcades médiévales de la façade, les fenêtres à meneaux… L’austérité des matériaux bruts est tempérée par la douceur des teintes et le moelleux des tapis, fauteuils, coussins… À quoi s’ajoute la gentillesse de l’accueil. Devenir hôtesse n’était pourtant pas chose évidente pour Isabelle. « Je suis plutôt du soir que du matin, et naturellement peu communicante, avoue-t-elle. Ma plus grande angoisse au départ était que toute la maisonnée soit réveillée avant moi ! Une fois ce stress dépassé est venu le plaisir de la rencontre. L’expérience s’est révélée un antidote à ma réserve naturelle. Les touristes de passage dans le Cantal sont en quête de nature, d’authenticité. Il n’y a pas de malentendu. J’aime la magie de ces rencontres et je m’amuse beaucoup à observer les couples ; j’imagine leur passé, leur avenir… » Un avenir qui passera sûrement par ici, quand reviendra le besoin ou l’envie de se ressourcer.

  1. Dans ce couloir, donnant sur le salon passait jadis la rue… Sol en tomettes, pierre et planchers bruts, l’effet rustique est vite tempéré par le confort de ce lieu insolite.
  2. Le mobilier du salon, délibérément disparate, rappelle simplement que la maison a traversé les siècles et vu défiler les styles.
  3. Dans les spirales voluptueuses de l’escalier en pierre menant aux chambres, se niche le mystère des vieilles bâtisses.
  4. Les objets comme les meubles ont été patiemment chinés dans la région et s’intègrent naturellement dans cette demeure multifacettes.
  5. Les Aurillacois se souviennent peut-être du magnifique séquoia qui poussait jadis dans le square Vermenouze. Abattu pour cause de maladie, les propriétaires en ont récupéré des planches pour réaliser ici un plancher, une tête de lit et d’originales séparations entre chambre et salle de bains.
  6. L’authenticité passe aussi par la diversité dans ce jeu de boiseries aux subtiles patines et de pierre aux lignes savamment mêlées.