Marais poitevin au bord de l'eau

Deuxième zone humide de France après la Camargue, le marais poitevin mérite que l’on s’attarde dans son labyrinthe aquatique.

Aux confins de la Vendée, de la Charente-Maritime et des Deux-Sèvres, le marais poitevin se divise en trois parties aux reflets changeants : le marais mouillé (partie originelle), le marais desséché (assaini pour les cultures) et la baie de l’Aiguillon (prés-salés et vasières). Le marais desséché, grand secteur agraire et domestiqué, est protégé des eaux de crues et des marées par des ceintures de digue. Les arbres y sont rares. Il s’oppose au marais mouillé, zone d’épandage des crues des rivières. D’immenses prairies inondables réservées aux pâturages collectifs ainsi que plusieurs hectares de terrées (petites plantations denses de frênes) sont enserrées dans une fine résille de chemins de terre et de bras d’eau. Selon leur taille, ces derniers se nomment rigole (équivalent d’une autoroute), bief (avenue), canal (boulevard), conche (rue) ou fossé (venelle).

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Marais poitevin : la plate en guise de gondole

La plate (barque à fond plat), si prisée des touristes, fut jusque dans les années 1960 l’unique moyen d’accès au marais mouillé. Tout transitait alors par voie d’eau : la livraison du pain, les mariages, les enterrements… Aujourd’hui encore, l’éleveur maraîchin utilise sa plate pour mener ses vaches au pré, transporter le foin, le bois et les mojettes, ces haricots blancs typiques de la région. Pour la faire avancer, pas de pagaie mais une pigouille, longue perche en bois avec laquelle on prend appui sur le fond. Dans cette zone du marais mouillé, il n’y a pas de villes, juste des villages et des hameaux perchés sur des monticules, à l’abri des inondations. Leurs venelles pavées zigzaguent dans toutes les directions et aboutissent forcément à l’un ou l’autre des canaux.


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Marais poitevin : de mignons petits villages aux façades colorées

Il fait bon flâner dans le village-rue de la Garette, sur les quais de Coulon, dans les venelles d’Arçais, et découvrir les lavoirs de Saint-Georges-de-Rex ou le pont-levis de Magné. Pour rallier ces hameaux, rien de tel que d’enfourcher une petite reine et de pédaler le long des conches et des méandres de la Sèvre niortaise. Instant privilégié de communion avec la faune et la flore du marais. Bonne nouvelle : la loutre est revenue. Cet animal sensible à la pollution est un baromètre de l’équilibre du milieu aquatique. Sur les langues de prairies, des chevreuils cohabitent avec de placides bovins, élevés pour leur viande. On ne pourrait, dans ce contexte, traire des vaches quotidiennement et acheminer leur lait. Pas de moutons non plus car ils sauteraient d’une parcelle à l’autre. Dans cet environnement de verdure, l’exploitation du bois de peuplier est, après le tourisme et l’élevage, la troisième activité économique du marais. Il s’agit d’une variété de peuplier, appelé blanc du Poitou, à l’écorce blanchâtre, qui a la particularité de croître assez rapidement. On l’utilise pour fabriquer des allumettes, des cagettes, des boîtes à camembert, du contreplaqué… Une fois abattus, les troncs sont débardés et mis à l’eau. Ils forment un train de bois flottant conduit sur son parcours par des hommes postés à intervalles réguliers sur les rives. Ils guident les troncs avec des perches jusqu’à La Garette où un port a été aménagé, avec un ponton spécial servant aussi à l’embarcation des vaches.