Geoffroy Delorme, photographe et aventurier a passé 10 ans à observer les chevreuils dans leur environnement. jusqu’à les apprivoiser. À moins que ce ne soit l’inverse.

Passionné par la vie sauvage, Geoffroy Delorme est tombé sous le charme des plus petits cervidés d’Europe, de leur intelligence et de leur faculté d’adaption. Photographe naturaliste, il consacre sa vie à l’étude comportementale, cette branche de la biologie appelée éthologie, créée au milieu du XIXe par un autre Geoffroy (Saint-Hilaire). Il s’est intégré à leur mode de vie, et pendant dix ans, s’est fait accepter comme un des leurs, dans une forêt domaniale de Haute-Normandie. Pour photographier les chevreuils au plus près, il a étudié leur psychologie et leur comportement. Au fur et à mesure de ses sorties, il s’est aperçu que les chevreuils reconnaissaient son odeur, ses différentes postures et gestes, au point de l’accepter dans leur environnement.

Geoffroy Delorme, un explorateur de voies nouvelles

Sa méthode, novatrice, consiste en une immersion totale dans l’habitat de l’animal, jusqu’au moment où sa présence est non seulement tolérée, mais admise au sein du groupe. Presque comme s’il en faisait partie. Il souhaite aujourd’hui partager son expérience et ses découvertes sur l’intelligence animale. Si celle des grands singes et des dauphins est connue, celle des chevreuils l’est moins. Dianne Fossey, Jane Goodall, Claudine André, Emmanuelle Grundmann, et d’autres éthologues de renom, n’ont pas vécu en immersion avec les animaux de nos forêt européennes. C’est donc en tant qu’ « explorateur de voies nouvelles » que Geoffroy souhaite faire progresser la connaissance sur les capacités cognitives des animaux vivant en milieu sauvage.

Pour vivre en harmonie avec ses nouveaux amis, pouvoir marcher dans leurs traces, il lui a fallu apprendre à connaître et à comprendre chacun d’entre eux, et il les a respectivement nommés Chévi, Fougère, Daguet, Sipointe ou Mef. En partageant leur vie, Geoffroy s’est découvert chaque jour lui même un peu plus sauvage. Son but était simplement de se laisser apprivoiser, et non le contraire.


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Observer les chevreuils : une leçon de vie

Chévi, Fougère, Daguet, Sipointe, Magalie et tous leurs compagnons m’ont accepté parmi eux et m’ont appris à vivre au jour le jour. J’ai partagé avec eux dix ans de bonheur malgré les difficultés de la vie sauvage. Ils m’ont enseigné à profiter d’émotions pures, à saisir l’instant.

  1. Pour gagner la confiance des agiles cervidés, il faut se représenter leur rythme de vie.
  2. Geoffroy Delorme et son favori, Chévi.
  3. « Alors, tu viens ? » Semble dire Espoir, le faon de Magalie, qui part se promener en forêt avec Prunelle. Les chevreuils sont installés partout en Europe, à l’exception de l’Irlande, l’Islande et la Corse.

Le plus beau souvenir de Geoffroy

« Quand Chévi est venu me voir de près la toute première fois, il y avait du brouillard. Nous étions avec Mef et Fougère. L’ambiance était à la détente et au jeu. Cela faisait quelques heures qu’il m’observait comme jamais il ne l’avait fait jusqu’alors. Mef, son rival amoureux, venait de lui chaparder sa compagne, Fougère, une petite chevrette belle à craquer. Chévi, très câlin et un peu apeuré, n’a pas osé venir la lui reprendre. Il m’a regardé, un peu pensif, puis j’ai vu une petite flamme dans ses grands yeux noirs :  ils se sont mis à briller comme jamais. Jusque-là, j’arrivais à marcher derrière lui, parfois à moins d’un mètre. Là, il a fait un pas vers mois, puis un autre. Il a tendu le cou, humé l’air ambiant et s’est retourné de temps à autre vers Fougère et Mef, comme pour avoir leur approbation. Il s’est avancé, s’est installé tout contre moi et m’a léché. Mon cœur battait à cent à l’heure. Il a alors rejoint ses deux compagnons, qui le regardaient, ébahis ! Un sentiment étrange m’a envahi ; c’est comme s’il m’avait dit : maintenant tu fais partie de la famille. Ensuite, il suffisait que je m’accroupisse à quelques centimètres derrière lui pour qu’il vienne se lover contre moi avec complicité. »

  1. Magalie fait la toilette de son faon, Prunelle
  2. Le chevreuil vit et dort par cycles courts, et Chévi s’offre une paisible sieste.
  3. En grignotant un roncier, il fixe l’objectif. Herbivore, l’animal se nourrit d’herbes, feuilles, baies, bourgeons et champignons. Il lèche le sel sur les pierres pour ses besoins en minéraux et les végétaux comblent la majeure partie de ses besoin en eau (jusqu’à 3 litres/jour).

Envie d’en savoir plus ? Retrouvez le livre Dans l’intimité des chevreuils, de Geoffroy Delorme, éditions Le Chevreuil, 27,90€


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