De juin à septembre, on les croise sur les versants des Alpes, entre 800 et 3 200 mètres d’altitude. C’est à cette période de l’année que les marmottes sont les plus faciles à observer.

C’est un son aigu qui ressemble à un chant d’oiseau. Au détour d’un sentier, une série de sifflements brefs vient troubler le silence de la montagne… Ce cri, c’est le cri d’alarme de la marmotte. Debout sur ses pattes arrière, une sentinelle prévient les membres de sa colonie qu’un aigle rôde dans les parages. Tous aux abris ! Les marmottes des Alpes se méfient du loup, de la martre et du renard. Mais c’est du ciel que vient le plus grand danger… Les adultes le savent, l’aigle royal est l’ennemi numéro un ; pour eux, mais aussi et surtout pour les plus jeunes, tout juste sortis du terrier à cette période de l’année ! Les marmottons, qui ne pèsent alors que 300 à 350 grammes, sont les proies les plus vulnérables… Ils n’ont aucune expérience et aucun moyen de défense. Mais les « siffleux », comme les ont si justement surnommés les Québécois, ont une solution pour échapper aux serres mortelles du rapace : la fuite organisée vers un abri secret aux entrées multiples.

Six mois d’activité en famille

C’est tout le génie de ce petit animal fouisseur, qui doit sa survie à ses talents de bâtisseur ! Partout où elles vivent, les marmottes creusent d’immenses galeries souterraines. Celles-ci peuvent s’enfoncer à 3 mètres de profondeur et mesurer 10 mètres de long. Les marmottes construisent un terrier d’hiver avec plusieurs entrées et plusieurs chambres (une pièce pour les latrines, une pièce de repos, une pièce d’hibernation…) et des terriers d’été, moins profonds, qui leur servent de refuges contre les prédateurs. En cas de danger, c’est là qu’elles se cachent : au signal de la sentinelle, l’ensemble de la colonie se précipite sous terre ! En juillet et en août, les marmottes passent leurs journées à se reposer, à jouer et à se nourrir, mais elles restent en permanence sur le qui-vive. Vigilantes et groupées, elles ne s’éloignent jamais de leurs terriers.Elles broutent des racines, des fleurs ou des tiges de plantes riches en acides gras polyinsaturés, et accumulent des réserves de graisse avant l’arrivée du froid.

Six mois de repos sous terre

Quand vient l’automne, le terrier d’hiver est prêt. Son emplacement n’est pas non plus choisi au hasard : les marmottes creusent la terre sur le versant oriental des pentes montagneuses, pour profiter au maximum du soleil pendant la période d’hibernation. Début octobre, quand la température descend en dessous de 12 °C, la colonie (qui peut compter jusqu’à vingt individus) descend dans le terrier suivant un rituel bien établi. Le mâle dominant ferme la marche et calfeutre l’entrée avec un bouchon de terre. La petite troupe s’installe alors dans la chambre tapissée d’herbes séchées et s’endort… Grâce à cette extraordinaire stratégie de survie, la marmotte entre en hibernation : sa température corporelle moyenne, de 38 à 40 °C en période d’activité, peut descendre jusqu’à 5 °C, et son rythme cardiaque passer de deux cents battements par minute à seulement vingt-huit ! Elle passe ainsi six mois de l’année au repos, avec quelques courtes phases d’éveil. Silence… Ce n’est qu’à la mi-avril, quand les prairies seront à nouveau couvertes de bourgeons, qu’elle réapparaîtra.

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  1. Un marmotton encore hésitant dresse la tête hors du terrier, prêt à replonger dans ce refuge dont l’entrée est à peine visible.
  2. Ce petit mammifère rondouillard est apparenté à la famille des écureuils. Adulte, la marmotte pèse entre 2 et 7 kilos et mesure à peine 70 centimètres de long (queue comprise).
  3. Excepté après son long sommeil de six mois où elle peut manger quelque charogne riche en protéines, la marmotte se nourrit presque exclusivement de plantes.
  4. Sevrés à 40 jours, les jeunes quittent le nid familial au mois de juillet, sous l’étroite surveillance de leur mère.
  5. Seule espèce de marmotte vivant en France, la marmotte des Alpes vit dans les Alpes mais aussi dans le Jura, les Pyrénées et la Lozère.
  6. Ces rongeurs pacifiques vivent en colonies constituées d’un couple parental, de jeunes adultes et de marmottons. Leurs jeux ressemblent à des combats mais ils ne sont jamais agressifs.