Présent dans notre imaginaire, le loup occupe désormais le terrain. Cet animal très social fascine autant qu’il inquiète.

Un vent glacial souffle sur la montagne enneigée. La pleine lune éclaire une scène qui semble surgir d’un lointain passé : six loups courant dans la nuit. Ils laissent derrière eux, sur la neige fraîche, une belle et unique trace régulière. Officiellement disparus de France dans les années trente, les loups ont fait leur retour dans les Alpes, dans la partie est des Pyrénées, dans le Massif Central et le Jura, mais ces revenants craintifs se montrent peu. En janvier s’ouvre une période importante pour ces animaux. C’est la saison des amours, coïncidant avec celle où la nourriture se raréfie. Le jeune gibier inexpérimenté a grandi et ne se laisse plus capturer si facilement. Pourtant, un loup a besoin, en moyenne, de quatre à cinq kilos de viande par jour. Si, dans nos contrées, les chevreuils représentent son menu principal, les craintes des chasseurs se sont avérées injustifiées : malgré les loups, le gibier n’a pas diminué. Sans doute les chevreuils, les cerfs et Les sangliers se font-ils plus vigilants et migrent-ils de plus en plus. Quant au canis lupus lupus, le loup européen, il reste fidèle à son territoire. Dans les Alpes, une meute règne sur un territoire de 150 à 250 km2, sa taille dépendant de l’abondance des proies disponibles.

Louveteaux

La meute, une histoire de famille

Des empreintes d’urine et des excréments déposés en des endroits stratégiques mettent en garde tout intrus. Ce type de marquage olfactif signifie : « Arrière ! Ceci est notre territoire de chasse ! » Gare au jeune loup qui s’aventure sur un territoire étranger, il en sera rudement chassé. Une harde de loups correspond à une cellule familiale. Celle-ci se compose des deux parents et de leurs rejetons des deux dernières années. Pendant la période des amours, le mâle ne s’éloigne pas de la femelle. Contrairement aux chiennes, les louves ne sont en chaleur qu’une fois l’an. Le dénouement se produit fin avril : quatre à huit louveteaux voient alors le jour, à l’abri de leur tanière. Ils ne pèsent que quelques centaines de grammes et leur tête encore trop lourde dodeline à la recherche des mamelles nourricières. Leur pelage, pour l’instant, est tout noir. Les louveteaux accaparent l’attention de leur mère. Heureusement, celle-ci peut compter sur le mâle et ses rejetons aînés pour lui apporter la viande fraîche qu’elle partagera bientôt avec sa portée. Les louveteaux n’ouvrent les yeux qu’au bout de deux semaines. Tout ce qu’ils voient influe désormais sur leur développement et leur comportement. Une semaine plus tard, ils sortent pour la première fois, sous les hurlements de la meute. Dès lors, chaque membre prend soin de ces louveteaux patauds près de la tanière et une véritable compétition s’engage pour gagner leurs faveurs.

Un compagnon de l’homme, bien avant le chien

Les aptitudes sociales du loup ont été reconnues il y a fort longtemps : il y a 25 000 ans, l’homme domestiqua le loup et l’utilisa comme compagnon de chasse. Au loup sauvage succéda le loup domestiqué puis, des générations plus tard, le chien. De nombreux scientifiques se sont évertués à comprendre la genèse de cette symbiose. Il semblerait que des femmes aient recueilli des louveteaux, les ayant peut-être même nourris de leur propre lait, ce qui a lié l’animal aux hommes. Depuis ce temps, le loup, puis le chien restent étroitement associés à la civilisation humaine. À l’automne, les louveteaux tout juste sortis de l’enfance sont déjà d’imposants animaux. Ces adolescents ont atteint la taille de leurs parents. Il n’y a qu’à la chasse que les anciens les surpassent encore. Les jeunes restent auprès de leurs parents jusqu’à ce qu’ils ressentent le besoin de régner sur leur propre territoire. Ainsi, c’est généralement entre 11 et 22 mois qu’ils s’apprêtent à leur tour à fonder une nouvelle harde. Au cours de ses nombreux déplacements, le loup traverse des routes, des voies ferrées, des rivières, et longe la nuit des zones habitées. Mais il reste un animal craintif qui évite soigneusement toute rencontre directe avec l’homme. Si par hasard, un loup croise votre chemin, deux attitudes sont possibles : se réjouir de cette situation rare ou frapper dans vos mains, ce qui, à coup sûr, le fera fuir.

  1. Venu d’Italie via le parc du Mercantour, le loup recolonise progressivement les massifs montagneux français, jusqu’aux Pyrénées-Orientales.
  2. Le retour de cet animal sauvage, aussi mystérieux soit-il, ne se fait pas sans heurts. Les éleveurs, notamment, doivent faire face à la prédation du loup sur les troupeaux de moutons.
  3. L’image des loups hurlant à la pleine lune relève d’une croyance erronée. Le hurlement avive la cohésion de la meute, préparant ses membres à une partie de chasse collective ou servant à éloigner les loups étrangers.
  4. En jouant avec leurs aînés, les jeunes loups développent rapidement les capacités qui vont leur permettre ensuite de chasser. C’est également ainsi qu’ils apprennent à communiquer avec leurs congénères.
  5. À l’âge de 6 semaines, ils partent pour des balades de reconnaissance et se nourrissent déjà presque uniquement de viande. Il est essentiel qu’ils se développent rapidement car, dès l’hiver venu, ils devront suivre les adultes sur de longues distances.
  6. Le loup choisit un endroit où dormir et digérer à proximité de sa proie, pour éviter que les corbeaux et les renards ne la lui dérobent.