Ces arbres inspirent, par leur âge vénérable, un profond respect auquel s’ajoute un sentiment de sérénité.

Tanné par le soleil et déformé par le vent, il défie les éléments et s’incline parfois devant eux, leur sacrifiant de temps à autre une partie de son houppier. Un arbre centenaire rayonne, stoïque, dégageant force, quiétude et sérénité. Il fait bon s’asseoir un instant à son pied pour se reposer, méditer, suspendre le temps. La langue française est riche d’expressions en lien direct avec les arbres. Souvent, l’homme lui est comparé : ne dit-on pas « attaché à ses racines », « prendre racine », « être mal fagoté » ou « avoir la gueule de bois », à moins que ce ne soit la langue ? Un ami de longue date avec lequel on ne se gêne guère est appelé « vieille branche ». Une marque -d’affection qui en dit long.

Un symbole de justice

L’arbre est également personnifié : nous lui prêtons ainsi une silhouette tourmentée, courbée, comme celle d’un vieillard, un visage ridé, osseux, un nez bosselé ou des doigts crochus quand ce ne sont pas ses branches qui hurlent sous l’effet du vent. De bien lugubres métaphores qui tranchent avec le rayonnement fortement positif de l’arbre. Il ne s’agit pas seulement d’ondes bienfaisantes. Très concrètement, un hêtre centenaire produit chaque année environ 4 600 kg d’oxygène, de quoi assurer la survie d’un homme pendant treize ans. Au Moyen Âge, les arbres servaient à matérialiser les frontières. Placés sous l’autorité du roi, ils étaient, de fait, intouchables. Sous leurs frondaisons, on rendait la justice, mais on riait aussi beaucoup, buvant, dansant et s’aimant (« en regardant les feuilles à l’envers »). -Certaines communes sont en train de faire renaître une très ancienne coutume, celles des « tilleuls à danser », des arbres à double couronne, équipés d’une plate-forme supportée par une charpente. Plusieurs jeunes arbres au houppier étagé ont été plantés afin que dansent sur leur plancher les générations futures. L’association Arbres (Arbres remarquables : bilan, recherche, études et sauvegarde) a mis en place en 2000 un label afin de favoriser la reconnaissance du patrimoine arboré de France.

Quel âge as-tu ?

Ces arbres labellisés, au nombre de 350 en 2014, sont exceptionnels au titre de leur histoire, de leur dimension, de leur longévité, de leur forme ou en raison des croyances, légendes et pratiques qui y sont associées. Cet inventaire compte de nombreux arbres dépassant le demi-millénaire.

Pour estimer l’âge d’un spécimen sur pied, la dendrochronologie (science s’attachant à la datation des pièces de bois) se base sur sa circonférence. Celle-ci, mesurée à 1,30 m du sol, mise sur une croissance annuelle moyenne de 2,5 cm – à affiner en fonction de l’espèce, de l’environnement et du milieu (naturel- ou urbain). La longévité d’un arbre est à mettre en lien avec son essence. S’il n’est pas étonnant de voir un if atteindre 500 ans, voire 1 700 ans, un hêtre du même âge demeure exceptionnel. Le doyen -supposé des arbres français est un olivier d’environ 2 000 ans, vivant à Roquebrune-Cap-Martin, dans les Alpes-Maritimes. Respect…

  1. Le châtaignier, ancré non loin du col de Bavella (Corse-du-Sud), est un colosse. La circonférence de son tronc est de 12,40 m.
  2. L’évêque de Dol se doutait-il lorsqu’il planta ce châtaignier en1700, que l’arbre dominerait encore le Mont-Dol (Ille-et-Vilaine), plus de trois siècles après ? Son tronc noueux, d’une circonférence de 6,80 m, constitue un foyer de biodiversité.
  3. Le chêne-cuve, roi de la forêt de Brotonne (Seine-Maritime),dresse vers le ciel ses quatre troncs réunis qui forment en leur centre une cuvette. L’eau stagnant dans cette cuvette serait même dotée de vertus dermatologiques en raison de sa forte teneur en tanins.
  4. Unique en France, le hêtre pleureur du jardin botanique de Bayeux (Calvados) déploie une couronne de 40 m de diamètre. Une armaturea été spécialement conçue pour lui et l’aide à soutenir le poids de ses branches.
  5. L’if de Saint-Ursin (Manche),âgé de plus de 1 000 ans, a développé de spectaculaires racines adventives descendantes. Les pèlerins avaient pour habitude de se glisser dans sa cavité pour invoquer saint Ursin, espérant être ainsi exaucés.
  6. L’arbre ne révèle son âge qu’une fois coupé. Seule sa circonférence en donne une estimation.
  7. Certains arbres âgés présentent des formes bizarres, conséquences d’une maladie, d’une meurtrissure, d’une contrainte ou d’un « attentat » météorologique (foudre, gel).
  8. Le beau chêne de Saint-Vincent-de-Paul, dans les Landes, estimé à 800 ans, s’épanouit à quelques mètres de la maison natale du saint.
  9. La curiosité du thuya géant du jardin du Parc, à Vitré (Ille-et-Vilaine), réside surtout dans sa structure : ses branches,en retombant dans la terre, ont formé de nouvelles racines, quasiment tentaculaires, qui couvrent au sol une surface de 1 700 m2.

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